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Brevet, contentieux unitaires : maintenant ou jamais ?

Publié le vendredi 6 janvier 2012
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Brevet, contentieux unitaires : maintenant ou jamais ?
Alors que l’Union européenne avait annoncé souhaiter avancer sur le brevet unitaire, et les contentieux liés, avant la fin de l’année 2011, le projet reste toujours en suspens.

L’Europe peine à remplacer ses piliers traditionnels par un nouveau socle adapté à l’économie de l’innovation. De plus, l’objectif de Lisbonne sur l’effort de R&D est un horizon qui s’éloigne et les fondations monétaires de ce socle sont en train de vaciller.

Et même si l’Europe a compris la nécessité d’encourager l’innovation sur son territoire dans l’espoir d’y créer ou d’y maintenir des emplois à forte valeur ajoutée, investir en direction de l’innovation est inutile si les acteurs du monde de l’innovation ne bénéficient pas d’une protection efficace, prévisible et à un coût raisonnable.

Dans ces conditions, le chantier du brevet communautaire, lancé il y a plus de quarante ans, peut-il aboutir ?
La nécessité demeure, mais les obstacles à surmonter restent immenses, même si l’espoir est toujours là, pour les professionnels qui souhaitent plus d’efficacité pour la protection des fruits de l’innovation.

Les faiblesses du système actuel

Le système de brevets en Europe reste aujourd’hui morcelé et décourage les innovateurs. Les grands concurrents de l’Europe n’ont pas à affronter ce handicap. Un système de brevets unifié est donc nécessaire pour renforcer la compétitivité de l’Europe.

Le système européen actuel des brevets comporte des faiblesses

Si l’Organisation européenne des brevets regroupe aujourd’hui 38 États, sa compétence s’arrête cependant neuf mois après la délivrance du brevet européen. Le titulaire du brevet européen doit ensuite procéder à des formalités de traduction et de validation dans la plupart des États membres, s’il souhaite disposer d’un titre opposable dans ces pays. Au coût de ces formalités s’ajoute la nécessité de payer chaque année à chaque État des taxes pour maintenir le brevet en vigueur. Ces coûts sont donc dissuasifs pour la plupart des déposants qui limitent leurs validations à quelques États membres.

En outre, un titulaire de brevet qui souhaite le faire respecter doit poursuivre les contrefacteurs devant les tribunaux de tous les États où se produit la contrefaçon pour la faire cesser. Or, les procédures devant les tribunaux saisis sont différentes selon chaque État et les lois divergent sur des points importants.

Des systèmes concurrents plus efficaces

Face à ce morcellement du système européen, le système américain est unitaire : un seul office, un seul système judiciaire, sous le contrôle d’une Cour d’appel fédérale spécialisée et de la Cour Suprême des États-Unis. Des critiques sont régulièrement adressées au système américain quant à la qualité des brevets délivrés par l’office et au coût des procédures judiciaires, mais il a eu le mérite de favoriser le développement d’une économie de l’innovation dynamique et prospère.

Aujourd’hui, les systèmes chinois et coréens ont également acquis une crédibilité telle que de plus en plus de déposants américains, et même européens choisissent de déposer leurs demandes de brevet auprès de ces offices dans des cas où ils abandonnent toute protection en Europe…

Les obstacles sur la voie d’un système unifié de brevets sont considérables

La voie de la coopération renforcée pour la mise en œuvre d’un Brevet de l’Union européenne ou « Brevet unitaire » offre enfin une perspective pour avancer. Cependant, il n’est ni envisageable, ni envisagé de mettre en place le Brevet unitaire sans système juridictionnel unifié pour juger de la validité et de la contrefaçon de ce titre. Il est également difficile de laisser hors d’un tel système les centaines de milliers de brevets européens délivrés.

La mise en place d’une coopération renforcée pour créer un Brevet unitaire fait l’objet d’un large accord

De nombreuses tentatives de mettre en place par la voie d’un règlement européen un Brevet unitaire couvrant la totalité du territoire de l’Union ont avorté sur la question des langues. D’une part, les entreprises européennes ne pouvaient accepter un Brevet unitaire dont l’interprétation aurait varié selon les multiples langues officielles dans lesquelles il aurait dû être traduit pour des raisons de coût et de stabilité juridique. D’autre part, certains pays dont en dernier lieu l’Espagne et l’Italie se sont fermement opposées à ce qu’un brevet puisse avoir valeur juridique sur leur territoire sans qu’une traduction dans leur langue officielle en ait été fournie.

La Commission européenne a proposé le 14 décembre 2010 d’utiliser la voie de la coopération renforcée, pour mettre en place un Brevet unitaire, valable sur la totalité du territoire des États signataires. Le Brevet unitaire serait examiné et délivré par l’Office européen des brevets (OEB), dans une seule langue de procédure (l’allemand, l’anglais ou le français). Pendant une période transitoire maximale de douze ans, le titulaire du brevet devra fournir une traduction en anglais de la description, si la langue de procédure est le français ou l’allemand, ou bien une traduction dans une langue officielle de l’Union si la langue de procédure est l’anglais. Ces traductions seront déposées auprès de l’OEB et publiées par cet organisme.

Elles auront une valeur purement documentaire. La période transitoire prendra fin quand la Commission aura déterminé sur avis d’un groupe d’experts que la qualité des traductions automatiques est suffisante pour permettre la suppression de cette obligation de dépôt. Le Conseil des ministres et le Parlement de l’Union ont accepté cette proposition. Vingt-cinq États ont indiqué leur intention d’adhérer au projet, c’est-à-dire tous les États membres, à l’exception de l’Espagne et de l’Italie, qui ont d’ailleurs saisi la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) d’un recours contre la décision du Conseil des ministres d’avancer dans la voie de la coopération renforcée. Sous réserve du rejet de ce recours et de la conclusion d’un accord sur le règlement des litiges, la voie est donc ouverte à la mise en place du Brevet unitaire…

Les obstacles à la mise en place d’un système européen unifié de règlement des litiges de brevets

La Commission a élaboré un projet d’accord sur le règlement des litiges relatifs aux Brevets unitaires applicable sur le territoire des États coopérants, qui serait également applicable aux brevets européens sur le même territoire. Ce projet créerait un système juridictionnel spécifique, comportant des divisions nationales (seulement compétentes si elles sont appelées à traiter un nombre suffisant d’affaires), des divisions régionales (regroupant les pays n’ayant pas suffisamment d’affaires à traiter à eux seuls) et une division centrale (pouvant traiter des cas ne dépendant ni d’une division nationale, ni d’une division régionale, et pouvant avoir compétence exclusive sur la validité). Une instance d’appel serait également créée. Les formations de jugement seraient mixtes juges juristes et juges techniciens siègeraient ensemble, afin de garantir un haut niveau de compétence.

La CJUE a donné le 8 mars 2011 un avis négatif : la création d’une telle juridiction priverait les États membres et la CJUE d’une partie de leurs compétences. Cet avis sonne-t-il le glas du système unifié de règlement des litiges de brevets et par voie de conséquence celui du Brevet unitaire ? La Commission et la présidence polonaise ont élaboré un nouveau texte en septembre 2011 pour tenter de surmonter les obstacles mis en évidence par la CJUE.

Pouvons-nous avoir des raisons d’espérer ?

Le nouveau projet

L’obligation de créer des divisions régionales en dessous d’un nombre minimum d’affaires est supprimée par le nouveau projet. Ce point est particulièrement critiqué par les représentants des entreprises qui y voient à juste titre un risque majeur pour leurs Brevets unitaires et leurs brevets européens qui seraient soumis aux décisions de juges ne disposant pas des compétences suffisantes.

Le système de la marque communautaire serait inadapté

Ce système est caractérisé par le fait que les juridictions appelées à traiter du contentieux des marques communautaires sont en fait les juridictions nationales agissant comme juridictions communautaires, à la fois en première instance et en appel. La seule harmonisation permise par ce système est donc celle qui résulte de la saisine de la CJUE pour interpréter le droit communautaire. Il n’apparaît pas envisageable que des questions relatives à la nouveauté, à l’activité inventive, à la contrefaçon par équivalence qui reposent sur une analyse détaillée de la qualification juridique de faits techniques puissent être valablement harmonisées par ce biais.

L’expression d’une forte volonté politique est donc nécessaire pour surmonter ces obstacles

Il est assez facile de trouver des arguments juridiques contre un projet de l’ampleur nécessaire pour créer un véritable système européen unifié de brevets. Pour les surmonter, il est nécessaire d’affirmer fortement au niveau politique qu’il s’agit d’un impératif devant lequel doivent céder des contingences qui ne sont pas primordiales, eu égard aux enjeux.

 

Sources : Les Echos

 

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IEEPI